La mobilité ou « l’enfer c’est les autres »
Frustration pour beaucoup d’automobilistes : un trajet en voiture peut prendre moins de temps que trouver une place de stationnement. C’est vrai à Forest comme dans l’essentiel de la Région.
Cependant, pour des Bruxellois-es de plus en plus nombreux, l’omniprésence automobile défigure une ville dont on peine à imaginer à quoi elle pourrait ressembler sans toutes ces voitures garées, roulant ou s’immobilisant mutuellement dans le trafic. Et les piétons, cyclistes, landaus et poussettes n’ont qu’à se partager les trottoirs et autres espaces de bitume libres. Les objectifs fixés par le Plan Iris 2 – notamment une diminution de 20% de la charge du trafic automobile à l’horizon 2018 – sont très loin d’être atteints. Beaucoup de citoyen-ne-s aspirent à plus d’espaces publics apaisés par rapport à la circulation.
La déclaration de politique générale de la majorité communale de 2012 indique que « L’espace public doit être géré et partagé équitablement, dans le respect de tous les usagers, en encourageant notamment les formes de mobilité active (aménagements piétonniers et cyclables sécurisés, éclairage public suffisant, parkings vélos, sens uniques limités, balades organisées, etc.). ». Dans une ville dominée par la voiture, cela implique de réduire son emprise. Dans sa motion du 2 juin 2015 relative à un engagement des communes en vue de la COP21, le Conseil Communal de Forest s’engage à intervenir sur différents secteurs responsables des émissions de gaz à effet de serre dont le trafic routier.
Au niveau de notre commune, la volonté est ainsi de réduire le trafic de transit dans les quartiers : limiter la vitesse en installant des « coussins berlinois » et des plateaux, rendre les traversées piétonnes piétonnes plus courtes, c’est peser sur le rapport de force entre les véhicules et les piétons que nous sommes tous, y compris les automobilistes descendus de leurs véhicules.
Des voitures à l’arrêt sur les pistes cyclables, garées sur un trottoir, un passage piéton ou une place réservée aux moins valides : cela arrive bien trop souvent. C’est gênant et surtout dangereux pour les cyclistes, les piétons et les personnes à mobilité réduite. Il est indispensable en tant que décideur public de mettre des balises, au besoin physiques, pour empêcher cela.
Ce ne sont pas les seules mesures. Ainsi, 8 voitures partagées Cambio viennent de s’ajouter aux 11 existantes ; nous passerons à 59 à l’horizon 2020. Une voiture Cambio remplaçant 13 voitures individuelles, cela libère 234 places. Au niveau des transports en commun, la fréquence de la ligne 82 a été améliorée depuis la rentrée de septembre, notamment en heures creuses (liaison directe avec la gare du midi). Surtout, nous avons obtenu beaucoup du nouveau plan directeur bus de la STIB. Il offre des liaisons avec les communes voisines et avec le centre-ville. Nous sommes particulièrement heureux d’avoir obtenu une liaison directe des quartier Saint-Denis, Bervoets et Van Volxem avec la place Albert et le réseau de pré-métro.
Un nouveau tronçon de l’itinéraire cycliste régional vient de devenir opérationnel. Du boulevard de l’Humanité au Pont de Luttre, il y a maintenant une piste cyclable large et clairement séparée du trafic automobile. De quoi circuler sur ce trajet de manière douce et en toute sécurité. Nous devons maintenant obtenir de la Région que, suite au succès du test de mise à une bande dans chaque sens de l’avenue Albert, une vraie piste cyclable soit installée.
Au niveau de la région, l’usage du vélo a quadruplé depuis 1998, l’utilisation des transports publics régionaux (STIB) a augmenté de 94% entre 2000 et 2011, passant de 170 à 330 millions de trajets par an et l’utilisation de la voiture pour les trajets domicile-travail a diminué de 17% entre 2004 et 2011 (1) . C’est une tendance lourde et notre commune ne peut pas rater ce train-là.
On associe libération de la voiture et déclin du commerce. C’est oublier la riche activité commerciale qu’ont connue nos quartiers et qui a décliné suite à l’avènement de grands centres aux frontières de la Région, centres conçus précisément pour les automobilistes. Tendance récente, on observe que la plupart des grandes et moyennes surfaces qui s’établissent sur la commune sont intégralement absorbées par la consommation locale souvent sans dommage pour les commerces de proximité existants. C’est bénéfique pour l’emploi local, et les temps passés dans les transports et la convivialité.
On ne résout pas en un coup de baguette magique des décennies de « tout à la voiture » et nous ne portons pas de jugement moral quant aux raisons de garder un véhicule motorisé. N’en reste pas moins qu’une étude évalue à 632 le nombre de morts annuelles prématurées à Bruxelles dues à la pollution . À ces victimes anonymes, nous pensons. Une autre étude pointe les conséquences du trafic routier sur le rejet des transplantations du poumon. À ces autres victimes, nous pensons.
Nous voulons construire une ville qui évolue, avec ses habitants dont les mentalités et les priorités changent : ceux qui renoncent à la seconde voiture du ménage, ceux qui, par choix ou pour des raisons économiques, renoncent à leur unique véhicule pour pouvoir acheter un logement. Une voiture est un gouffre financier. Qui ne s’est pas demandé un jour si l’avantage procuré par cette voiture valait la peine, entre coût global et services rendus ? À ceux-là aussi, oui, nous pensons, nous voulons les encourager et nous sommes convaincus qu’ainsi faisant, nous construisons une ville plus belle et plus juste.
Est-ce déjà la ville dont nous rêvons ? Assurément pas. C’est la possibilité de la construire, ensemble.
Jean-Claude Englebert, échevin de l’environnement et de la mobilité (entre autres)
David Leclercq, Co-Secrétaire politique de la section locale de Forest
(1) http://villedurable.be/brusselsgreencapital/transport-local#sthash.fc8LlEEW.
(2) Plan bruxellois Air-Climat-Energie : http://www.leefmilieu.brussels/sites/default/files/user_files/planacefr_ep_20150420.pdf
(3) http://www.lesoir.be/1002232/article/actualite/belgique/2015-09-29/l-impact-sur-sante-pollution-liee-au-trafic-est-confirme